Rich et moi-même avons fait connaissance, en 1977, au sein du groupe de réflexion Analytic Services de Washington, financé par le gouvernement fédéral américain. Nous y avons travaillé, pendant quelques années, à soutenir le développement de la future Air Force. Après notre départ de l’Analytic Services, Rich a intégré la Harvard Business School. J’ai quant à moi rejoint la Defense Intelligence Agency, où j’ai dirigé les travaux d’évaluation du potentiel des forces militaires soviétiques menés par un groupe d’analystes militaires et civils. Si je ne suis pas autorisé à révéler le détail de ces travaux, je peux en dire que nos conclusions se sont avérées fondamentales, et que j’ai été chargé d’en informer le Chef d’état-major des armées des États-Unis, le Secrétaire de la Défense, ses adjoints et sous-secrétaires, et le négociateur en chef du contrôle des armements.
L’un des projets qu’il m’est autorisé de mentionner a débuté immédiatement après la première guerre du Golfe de 1991. La direction d’un travail d’amélioration du partage des renseignements entre les multiples agences du gouvernement américain et leurs clients m’a alors été confiée. La nécessité d’une amélioration, dans ce domaine, avait été relevée par plusieurs rapports de conclusions. Notre équipe, composée de représentants de chaque agence, a développé un réseau Internet international, dont elle a supervisé la mise en œuvre et la gestion, plus d’un an avant que les premiers sites commerciaux soient mis en ligne. Cette entreprise a donné lieu à d’importants bouleversements dans la manière dont les rapports de renseignement étaient produits et diffusés, et les progrès furent tels qu’il m’a été demandé d’effectuer une présentation à l’attention d’un groupe de hauts dirigeants britanniques du 10 Downing Street.
Ma nomination au National War College a constitué l’un des points culminants de ma carrière. La fonction de cette instance, créée en 1946, est d’examiner la stratégie américaine nationale globale et son utilisation des ressources nationales nécessaires pour sa mise en œuvre. Un programme d’un an a été mis en œuvre pour les potentiels futurs hauts responsables de la sécurité nationale : ambassadeurs, généraux, hauts fonctionnaires du Foreign Service et d’autres agences. Nous avons été divisés en petits groupes de 10, à la fin de l’année, et les membres de chaque groupe se sont rendus dans une région du monde différente, où ils ont séjourné pendant quatre semaines au cours desquelles ils ont rencontré les dirigeants des pays concernés. J’étais très intéressé par l’Amérique Centrale, à cette époque, et j’ai fait partie du groupe par lequel la Barbade, le Panama, le Salvador et le Mexique ont été visités. Nous avons été personnellement reçus par les présidents salvadorien et panaméen. Une journée nous a également été accordée par nos homologues de l’école militaire mexicaine, dont la politique était notamment de promouvoir l’exercice physique. J’en ai donc profité pour améliorer ma forme physique et améliorer mes performances, en course d’endurance et cyclisme, et pour perdre quelques kilos.
J’ai pris ma retraite du gouvernement en septembre 2000, après 20 ans de bons et loyaux services. L’opportunité m’a toutefois encore été offerte de contribuer à ses travaux. Le président Bush a commandé une étude bipartisane, en 2004, sur les problèmes susceptibles de se poser en matière de collecte de renseignements sur les armes de destruction massive en Irak. Cette commission « WMD », présidée par un Républicain – ancien juge de la Cour d’appel à la retraite et sous-procureur général –, et coprésidée par un Démocrate – un ancien sénateur et gouverneur de l’État de Virginie –, comprenait sept personnalités universitaires et gouvernementales. Il m’a été demandé de rejoindre la commission et de diriger le volet de partage de l’information.
On m’a souvent demandé, ces dernières années, ce qui m’avait poussé à travailler pour le gouvernement. J’ai eu la chance d’effectuer une carrière au sein de la communauté du renseignement. Les métiers les plus passionnants ne sont pas forcément ceux qui paient le mieux. Plutôt que de me contenter de me plaindre du gouvernement, j’ai eu l’opportunité de contribuer au fonctionnement de notre pays et, en prime, de mener une carrière fascinante. Si je ne peux pas révéler grand-chose de ce que j’ai accompli, je peux dire, sans équivoque, à quel point il fut gratifiant et enthousiasmant d’œuvrer pour l’intérêt général. Il m’a été offert de travailler avec certaines des personnalités les plus brillantes, militaires et civiles, des États-Unis et de pays du monde entier, ce qui n’a pas constitué le moindre des intérêts de ce métier. Quel sentiment que de savoir que l’on travaille à des questions essentielles pour le pays.
John Fitzgerald Kennedy a déclaré, dans son discours inaugural : « Ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous – mais ce que vous pouvez faire pour votre pays. »